top of page

De la difficulté à prendre les « vraies mesures »

« Du temps qu’il régnait sur toutes les Russies, Khrouchtchev reçut en cadeau une coupe de la plus belle draperie du monde. Il voulut d’en faire faire un costume et convoqua à cet effet le plus illustre tailleur de l’Union Soviétique, artiste émérite du peuple et titulaire de l’ordre de Lénine. Hélas, l’habile homme dû se récuser : il n’avait pas assez de tissu pour vêtir la vaste corpulence du premier secrétaire. Promesses, menaces rien n’y fit : il fallut sans plus de résultat, en quérir un autre puis un autre et ainsi de suite jusqu'à ce que de guerre lasse, « M.K. » décrète que ses compatriotes n’étaient décidément qu’une bande de moujiks et des bons à rien et s’en aille sonné, à Saville Row, à la porte du meilleur faiseur de Londres. Mais celui-ci ne put lui aussi que déclarer forfait, et de même les espagnols et les italiens pressentis auprès de lui. De guerre lasse, les rabatteurs de Nikita Sergeievitch s’adresse à un petit tailleur de rien du tout, peut être bien juif de surcroît, qui exerce dans un minuscule village du fond de la Roumanie. Il vient à Moscou et en trois jours, sans effort particulier, exécute un super complet qui va à Khrouchtchev comme un gant. Il touche un gros chèque, quelques médailles et regagne son village où il est reçu en héros. « Comment as-tu donc fait ? lui demande t – on. – C’est tout simple : j’ai pris les vraies mesures … ».

Il en est des bonnes mesures comme de ses propres vérités. Il y en a plusieurs parce qu’elles sont subjectives. Quand une bonne mesure produit de bons résultats c'est qu’ils correspondent à sa propre attente initiale.


Comme le « geste gratuit » n’existe pas, la bonne mesure correspond toujours à son intérêt personnel. Mais, ce n’est pas suffisant. L’équation de la réussite, c’est d’associer la satisfaction de son égo à l’intérêt général. Mais est ce possible ?

En écologie par exemple, chacun connait les vraies mesures qu’il faut prendre mais l’intérêt général contredit trop souvent les intérêts personnels. Ce sujet mérite, sans conteste, un développement argumenté. Ce n’est pas ici l’objet de ce texte.

Sur les marchés financiers par exemple, tout le monde s’accorde sur la toxicité des subprimes, mais l’intérêt général contredit trop souvent les intérêts personnels. Ce sujet mérite, sans conteste, un développement argumenté. Ce n’est pas ici l’objet de ce texte.

Plus modestement et pour cibler le cas qui nous intéresse :

Quand le constat d’un mauvais accompagnement à la maîtrise d’ouvrage du système d’information est partagé par tous, quand la prescription pour en sortir est dictée par une autorité réputée experte, alors pourquoi le mal persiste t – il ? Pourquoi les « vraies mesures » ne sont elles pas prises ?


Eh bien parce que le SIH n’est toujours pas perçu comme un facteur d’efficience, que l’intérêt général, faute d’argument, n’est pas valorisé et donc qu’une telle mesure ne peut pas être un critère pour glorifier son ego. Pour être précis, quand le dernier rapport de la cour des comptes dans son chapitre sur le système d’information préconise de :

  1. Maintenir le cap de la stratégie « Hôpital numérique » et engager sans tarder les travaux préparatoires à son deuxième palier, en l’orientant vers la convergence des systèmes d’information au sein des groupements hospitaliers de territoire ;

  2. Subordonner le soutien financier aux investissements informatiques à la réalisation de gains d’efficience, contractualisés dans le cadre des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens ;

  3. Bâtir au niveau régional une expertise en matière de maîtrise d’ouvrage, pour venir en appui aux projets informatiques hospitaliers en mobilisant, avec le soutien de l’ANAP, les GCS « e- santé » existants ;

  4. Rendre opposables aux éditeurs de logiciels les référentiels d’interopérabilité et de sécurité en vigueur et intensifier les travaux d’élaboration des référentiels « métiers »

  5. Rappeler les modalités d’application des règles de la commande publique pour les établissements adhérant à des structures de coopération qui éditent des logiciels ;

  6. Intégrer la stratégie d’ouverture et de convergence des systèmes d’information hospitaliers dans une approche plus large d’informatique de santé partagée avec les autres acteurs du système de soins.

Rien n’est faux, rien n’est nouveau, rien n’est irréaliste, rien n’est infaisable, non plus.

Alors, pourquoi ? C’est bien parce que l’établissement ne s’est pas approprié son système d’information, que sa valeur ajoutée n’a pas convaincu les managers des hôpitaux.

« Les lois claires en théorie sont souvent le chaos à l’application » disait Emmanuel Levinas.

Le chaos dans notre cas, c’est la confusion. Elle est née d’une méconnaissance par certains du sujet. Comme il est vrai que la communication du trio « directeur – médecin – ingénieur » a toujours été laborieuse, il y a souvent cacophonie. Le sujet n’est donc pas vraiment ni compris, ni tranché. Qui va donc porter ou encourager un projet qui ne fait pas consensus ?

Pour tenter d’en sortir, il faut changer de modèle. Je préconisais dans un de mes précédents blogs d’essayer la méthode dite « agile », c'est-à-dire de ne pas viser immédiatement la réussite de l’entièreté du projet mais d’avancer par étape et par itération. Pas de méga – planning, pas de documentation lourde et exhaustive, pas de tableaux Excel complexe pour mesurer en temps réel …

Essayer coûte moins que d’échouer ou de ne rien faire. N'est - ce - pas ?


  • Facebook Black Round
  • Google+ Black Round
  • Tumblr Black Round
bottom of page